
Poète "du Pays"
POEME "AU PAYS" DE MARC-ANDRÉ FABRE
Quand je vais respirer l'air du Causse Comtal
Je me promets, au cours de ma nouvelle étape,
De mieux me recueillir pour que rien ne m'échappe
Du charme qui m'a fait, pour toujours, son féal.
Mais le temps, sans répit, m'emporte dans sa course
Et je reviens, à l'heure ou le soleil décroît,
Tel le pâtre altéré qui, penché sur la source,
N'a pu retenir l'eau glissant entre ses doigts.
Lorsque, au loin, m'apparaît le clocher du village
Ou tant de disparus attendent mon retour
Et qu'un vieux paysan, que je hèle au passage,
Pour me serrer la main délaisse son labour.
Bien plus qu'un fardeau, pesant sur ma poitrine,
Écarte tout émoi de mon coeur languissant,
Je le sens s'agiter ainsi qu'une clarine
Dont nul autre que moi ne perçoit les accents.
J'ai chanté dans mes vers la maison paternelle
Tapie au seuil du Causse immense et désolé,
Cherchant à discerner d'ou me vient que, loin d'elle,
Comme tout Rouergat, je me sens exilé.
C'est qu'on y vit heureux, sans heurts et sans secousses
Et qu'à mon coeur si lourd de peines et d'ennuis
Sous aucun autre ciel ne furent aussi douces
La lumière de l'aube et la paix de la nuit.